Des chercheurs ont mis à l’épreuve la mémoire sociale des chimpanzés et des bonobos, en leur présentant des photos d’anciens proches. Ils ont découvert que les primates n’avaient pas la mémoire courte, loin de là.
Si un chimpanzé adulte voyait un pote d’enfance, même après plusieurs années sans contact, il n’aurait aucun mal à la reconnaître. C’est ce que révèle en substance une étude publiée dans la revue PNAS (Proceedings of the National Academy of Sciences), pilotée par des chercheurs travaillant dans diverses universités, de Harvard à Tokyo, en passant par Baltimore, Anvers, Constance et Saint-Andrews.
Pour leur étude, ils ont réalisé une expérience dans plusieurs zoos, en Europe et au Japon, auprès de 26 primates, chimpanzés et bonobos. Les chercheurs ont montré des photos d’autres singes aux primates étudiés.
Sur certaines photos, il y avait des membres de leurs familles ou d’anciens amis qu’ils n’avaient plus vus depuis de nombreuses années. Ils ont pu constater que les singes s’attardaient plus longtemps sur la photo d’un congénère qui lui semblait familier.
Crédit photo : PNAS
“L’attention des singes était biaisée vers les anciens membres du groupe plutôt que vers les étrangers. Ce qui indique une mémoire à long terme pour les partenaires sociaux passés. La force des préjugés à l’égard des anciens membres du groupe n’a pas été affectée par la durée de séparation”, ont établi les chercheurs, qui pensent même que la mémoire des grands singes peut durer jusqu’à 26 ans.
Une mémoire aussi sentimentale ?
Pour réellement juger de la fiabilité de la mémoire des singes, les chercheurs se sont fiés au regard avec un dispositif de suivi oculaire. Deux photos étaient présentes en même temps et le singe observait toujours plus longtemps son ancienne connaissance. Une méthodologie déjà utilisée auprès de nourrissons.
Les observations nées de cette expérience prouvent que le singe est encore plus proche de l’homme que l’on croyait. En effet, dans le règne animal, il existe d’autres espèces ayant développé une mémoire sociale comme les dauphins, les éléphants et les chiens. Mais cette mémoire repose essentiellement sur le son ou l’odorat. La reconnaissance mémorielle à travers des indices visuels était considérée comme exclusive aux humains.
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Au-delà de la simple reconnaissance, l’étude estime même que les singes ont aussi la capacité de se souvenir de la qualité ou du contenu de leurs relations passées. Ainsi, les singes seraient donc dotés d’une mémoire sentimentale : “les préjugés d’apparence des singes étaient plus forts pour les individus avec lesquels ils avaient des antécédents d’interaction sociale plus positifs”.