Nous avons connu le 19 juillet 2019 comme le jour du dépassement de la Terre. Une journée lors de laquelle l’humanité avait consommé l’ensemble des ressources que la Terre peut régénérer en une année. Et désormais il y a le jour du dérèglement. La France, qui s’est fixée un objectif climatique d’ici 2050, aura émis ce jeudi 5 mars l’ensemble des gaz à effet de serre qu’elle devait rejeter en une année.
La France s’était fixée l’objectif de la neutralité carbone d’ici 2050 en réduisant chaque année ses émissions de gaz à effet de serre. Mais avec un rythme de production au-dessus de la limite, l’objectif fixé par la France ne serait atteint qu’en 2085 selon une étude récente.
Crédit image: Shuttertstock/GranTotufo/L'industrie pétrochimique sur la rive du fleuve en France
Le cabinet de conseil Carbone 4 pour les quatre associations de l’« affaire du siècle » (Notre affaire à tous, Greenpeace France, Oxfam France et la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme), engagées dans un recours juridique contre l’État pour inaction climatique et soutenues par 2,3 millions de signataires d’une pétition, a réalisé un calcul sur la production des gaz à effet de serre en France. Leur résultat montre que la France est loin d’atteindre son objectif de neutralité carbone. En effet, à partir du jeudi 5 mars, le pays de l’hexagone dépasserait son émission de gaz à effet de serre d’une année.
Le cabinet Carbone 4 s’est appuyé sur des chiffres contenus dans la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), l’outil de pilotage de la politique du pays. La France ne devrait pas dépasser la barre des 80 millions de tonnes de CO2 si elle veut atteindre son objectif et être neutre en carbone d’ici 2050. Mais c’est loin d’être atteint. Les émissions françaises devraient atteindre cette année autour de 450 millions de tonnes de CO2, selon une projection réalisée par le cabinet Carbone 4. Ce qui serait cinq fois plus que la production annuelle prévue.
Sur le site Le Monde, Célia Gautier, responsable climat-énergie à la FNH (Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme), tire la sonnette d’alarme : « On savait que la France n’était pas sur les rails, mais pas qu’il y avait autant de chemin à parcourir. Il ne reste qu’une génération de trente ans pour faire reculer le jour du dérèglement de 300 jours, jusqu’au 31 décembre. Chaque jour où l’on procrastine vient creuser notre dette climatique. Or, on ne voit aucune redirection du gouvernement par rapport au retard accumulé. »
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Ce jour du dérèglement était déjà prévisible dans le rapport du Haut Conseil de 2019 pour le climat qui l’avait d’ailleurs souligné.
Selon les sources du site Le Monde, l’instance indépendante avait montré que le rythme de baisse des émissions de (1,1 % par an sur la période 2015-2018) est nettement insuffisant pour atteindre la neutralité carbone, en raison essentiellement de blocages dans les transports et le bâtiment.
Le gouvernement, dans le rouge, a révisé la SNBC pour augmenter les budgets carbone afin de revoir le plafond des émissions de gaz à effet de serre prévus entre 2019 et 2023. Une telle hausse des émissions pousse la France à rejeter dans l’atmosphère davantage de gaz à effet de serre à court terme, mais sera obligée de redoubler d’efforts sur le long terme au risque de manquer son objectif.