En Ouganda, des chimpanzés se retrouvent défigurés à cause des pesticides !

C’est dans un article publié dans Science of the Total Environment, le 24 avril, que la primatologue Sabrina Krief dévoile qu’une grande part des chimpanzés du parc de Kibale, en Ouganda, souffrent de graves malformations. Vétérinaire et professeure au Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN).


La fondatrice de l’association « Projet pour la conservation des grands singes » et son équipe de recherche se sont lancées en 2008 dans l’exploration de 25 kilomètres carrés du parc national de Kibale. Les chercheurs ont découvert qu’un quart de chimpanzés (16 sur 66) présentent des anomalies : « Certains individus n’avaient pas de narines, d’autres carrément la face creuse. Un chimpanzé semblait avoir quelque chose qui ressemblait à un bec-de-lièvre » décrit Sabrina. 

Crédit photo : Dominique Schreckling

De même, leur cycle de reproduction est lui-même atteint : « Plusieurs femelles n’ont pas de cycle sexuel, on ne les a jamais vues avec des bébés et elles n’ont a priori pas de descendants » précise la chercheuse. Outre les chimpanzés, d'autres singes ont aussi été touchés : sur 35 babouins observés, six d’entre eux présentaient des malformations. L’une des explications possibles serait la contamination due à l’agent orange utilisé dans les années 1970 afin de se débarrasser des arbres. Ce puissant herbicide qui contient de la dioxine : un polluant chimique dangereux qui peut entraîner des cancers, des maladies de la peau et… des maladies congénitales, c’est-à-dire des malformations à la naissance.

Pour en avoir le cœur net, les équipes ont effectué divers prélèvements sur leurs excréments dans la zone ainsi que sur les arbres, tiges de maïs, dans la rivière... et le résultat est alarmant ! Ils ont recensé la présence de nombreux produits toxiques tels que le DDT (anti-moustique très puissant utilisé pour repousser le paludisme), des pesticides, du chlorpyrifos (un insecticide neurotoxique) en plus de ça, le seuil autorisé est même dépassé.

Crédit photo: Safari Booking

En effet, les chimpanzés, qui pillent de temps en temps les cultures de maïs, posent évidemment problème étant donné que cette culture est contaminée de produits toxiques. En plus de leur couleur rouge… qui n’est pas naturelle, les maïs se sont avérés être contaminés par l’imidaclopride (un pesticide qui se diffuse dans tout l’organisme de la plate). De fait, les tiges de maïs irriguées par les eaux contaminées expliquent en partie les malformations.

Pour Barbara Demeneix, professeur au MNHN, cela s’explique par les perturbateurs endocriniens (agent chimique capable d’interférer dans le système hormonal d’un organisme) que l’on retrouve dans ces pesticides : « Ils interfèrent avec les hormones thyroïdiennes, qui sont très importantes pour le développement des embryons, notamment du cerveau, du crâne et de la face. On peut donc supposer que l’exposition aux pesticides pendant la gestation peut provoquer des malformations de la face ».

Néanmoins il leur reste encore à prouver quant à l’exposition aux pesticides des femelles gestantes. Pour ce faire, l'équipe doit réaliser une véritable chasse… à l’urine. Et oui, dès qu’un chimpanzé commence ses besoins, l’équipe s’élance dans le but de recueillir de précieuses gouttes !

Source : Reporterre
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