Portrait aujourd'hui d'un homme au destin incroyable qui porte les stigmates de l'histoire récente de l'Afghanistan. Sayed Sadaat, ancien très haut fonctionnaire afghan, a fui son pays l'an dernier et exerce aujourd'hui le métier de livreur à vélo, en Allemagne. Récit d'une trajectoire singulière.
Le retour au pouvoir des talibans en Afghanistan a semé le chaos et les habitants, du moins ceux qui le peuvent, fuient le pays par centaines dans l’espoir d’une vie meilleure.
Bien avant la prise de Kaboul par les fondamentalistes islamistes, de très nombreux Afghans, inquiets à l’idée de devoir tirer un trait sur leurs fragiles libertés, avaient déjà anticipé ce scénario, en fuyant leur terre natale, sans jamais se retourner.
C’est notamment le cas de Sayed Sadaat, un ancien ministre qui vit désormais comme réfugié en Allemagne, où il exerce le métier de… livreur à vélo, loin, bien loin de la vie qu’il a connue jadis.
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Sayed Sadaat, l'ancien ministre afghan devenu réfugié puis livreur à vélo en Allemagne
De 2016 à 2018, Sayed était en effet le ministre afghan des Communications. Un poste à responsabilité qu’il finit par abandonner au bout de deux ans, car, dit-il, il ne supportait plus la corruption gouvernementale.
Un temps consultant dans le secteur des télécoms, il décide finalement de quitter son pays en 2020, convaincu que l’Afghanistan, dont la situation sécuritaire se dégrade, est en train de courir à sa perte.
L’avenir lui donnera hélas raison !
Malgré une double nationalité afghano-britannique, il décide pourtant de fuir en Allemagne, où le hasard le conduit à s’établir à Leipzig.
C’est là, dans cette ville située à l’est du pays, que Sayed tente de refaire sa vie depuis plusieurs mois, en gagnant sa vie comme livreur.
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Les débuts n’ont pas été faciles car la barrière de la langue mais aussi le confinement lié à la pandémie de Covid-19 l’ont isolé, rendant ainsi son intégration délicate.
Mais le quinquagénaire n’a jamais baissé les bras et suit, depuis, des cours d’allemand, à raison de quatre heures par jour, tout en travaillant la semaine et les week-ends. Au total, il parcourt 1 200 kilomètres à vélo tous les mois.
Un emploi du temps chargé mais il ne regrette pas son choix !
« Il n’y a pas à avoir honte, c’est un travail comme un autre », explique-t-il ainsi, tout en assurant toutefois qu’il s’agit d’un emploi « pour une période limitée ».
À terme, Sayed espère en effet se rendre utile auprès des autorités allemandes sur les questions afghanes. Et nul doute que son expérience pourra être bénéfique si le pays fait appel à lui.
Pour rappel, la communauté afghane représente le deuxième groupe de migrants le plus importants en Allemagne, derrière les Syriens, avec pas moins de 210 000 demandes d’asiles déposées ces six dernières années.