C’est une petite révolution que vient de connaître Le Robert. Le dictionnaire de la langue française a ajouté le pronom non-binaire « iel » dans sa version numérique.
Crédit : defotoberg/ Shutterstock
Alors que chaque année de nouveaux mots (adjectifs, noms…) et noms de personnalités font leur entrée dans le dictionnaire, c’est un pronom qui fait parler de lui.
A priori, des pronoms, il n’y en a pas des masses. Pourtant, cette année, le pronom « iel » a été intégré au dictionnaire Le Robert courant octobre. Ce pronom est une contraction des pronoms « il » et « elle » utilisés par les personnes non-binaires. C’est-à-dire, des personnes qui ne se reconnaissent ni comme fille ni comme garçon. Le pronom « iel » permet alors « d’évoquer une personne quel que soit son genre », explique la définition du Robert.
Une entrée qui suscite la controverse
Chaque mois, les lexicographes du dictionnaire ajoutent des mots et des expressions. On retrouve par exemple, les mots « antivax » et « passe sanitaire » cette année. Et désormais le pronom inclusif « iel ». « Les nouveaux mots répondent à un besoin. C’est le cas du mot ‘iel’ », a justifié Marie-Hélène Drivaud, directrice éditoriale du Robert.
Cette dernière souligne par ailleurs que « la langue française est une langue genrée où il faut choisir son camp, ‘il’ ou ‘elle’ ». Ce choix a suscité l’indignation auprès de nombreuses personnes, notamment des politiques comme Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l’Éducation nationale regrette ce nouveau pronom, indiquant par ailleurs que « l’écriture inclusive n’est pas l’avenir de la langue française », sur Twitter.
Je soutiens évidemment la protestation de @FJolivet36 vis-à-vis du #PetitRobert
— Jean-Michel Blanquer (@jmblanquer) November 16, 2021
L’écriture inclusive n’est pas l’avenir de la langue française.
Alors même que nos élèves sont justement en train de consolider leurs savoirs fondamentaux, ils ne sauraient avoir cela pour référence: https://t.co/09thJzQ7iN
De son côté, Le Robert explique son choix et se défend : « Depuis quelques mois, les documentalistes du Robert ont constaté un usage croissant du mot ‘iel’ [à travers des corpus de textes]. [...] La mission du Robert est d’observer l’évolution d’une langue française en mouvement, diverse, et d’en rendre compte. Définir les mots qui disent le monde, c’est aider à mieux le comprendre », indique le communiqué.
Les Éditions Le Robert réagissent à la polémique sur l’introduction du mot « iel » dans leur dictionnaire en ligne et offrent un éclairage sur les critères et circuits de décisions qui président à l’intégration des mots au dictionnaire.https://t.co/viln4m2eQh#iel #PetitRobert
— Le Robert (@LeRobert_com) November 17, 2021
Les personnes non-binaires félicitent l’entrée du pronom dans le dictionnaire
Crédit : mizar_21984/ Shutterstock
D’un autre point de vue, la communauté et les associations transgenres félicitent l'entrée du pronom « iel » dans le dictionnaire. « C’est presque quelque chose d’historique, se réjouit Lee Ferrero, fondateur de Transat, une association transgenres à Marseille. [...] Les détracteurs du pronom ‘iel’ nous disaient, ‘ce n’est pas français, ça n’existe pas, vous dénaturez la langue’. Désormais, avec cette reconnaissance par le dictionnaire, ces arguments vont peu à peu disparaître. Cela va faire bouger les choses ».
En France, 22% de la population des 18-30 ans ont déclaré ne pas se reconnaître dans un genre « fille ou garçon », d’après un sondage Ifop effectué à l’automne 2020.