Noa Jansma, une étudiante originaire d’Amsterdam âgée de 20 ans, subit trop souvent le harcèlement de rue. Pour contrer cela, elle a décidé de se prendre en selfie avec eux et de les montrer sur Instagram.
Dans la publication qui présente son projet, elle explique sa démarche: « Puisque beaucoup de personnes ne savent toujours pas avec quelle fréquence et dans quel contexte le harcèlement arrive, je montrerai mes harceleurs pendant un mois entier ».
Interrogée par le site Redpers, elle avoue que le selfie était le moyen adéquate pour reprendre le contrôle sur ses harceleurs, plutôt que de continuer à subir leurs remarques : « Souvent, les femmes ne savent pas répondre à un commentaire sexiste. Poursuivre sa route semble être la seule solution, mais cela n’a aucune conséquence pour les harceleurs. Parfois, je leur faisais un doigt d’honneur, mais je me sentais bête après. Je voulais faire quelque chose qui me donne du pouvoir sur eux. »
Et c’est lors d’un voyage en train, lorsqu’elle surprend deux jeunes en train de la filmer tout en débitant des remarques sexuelles et sexistes, qu’elle eut l’idée de faire des selfies: « J’ai longtemps marché avec cette idée en tête, je n’osais pas faire le premier pas. Mais quand j’ai demandé à un homme de venir avec moi faire une photo, il a répondu avec enthousiasme » confie-t-elle au site Het Parool.
Elle a ainsi créé un compte sur Instagram, dédié à sa démarche, appelé «dearcatcallers» (que l’on peut traduire par «chers harceleurs»). Pendant tout le mois de septembre, elle a publié une vingtaine de selfies où on la voit un peu désabusé, un visage très neutre, tandis que ses messieurs semblent très heureux.
Sur chacune des publications, elle inscrit le genre de réflexions qu’elle reçoit de la part du harceleur. Cela va de « Sexy! Tu veux monter dans ma voiture » à « Je sais ce que je voudrais faire avec toi, bébé » en passant par des propositions tout aussi osées et dégoûtantes les unes que les autres.
« Beaucoup de mes amis ne me croyaient pas quand je leur disais que cela arrivait si souvent » dit-elle. Elle donne maintenant la preuve par l’image que le harcèlement de rue est un problème quotidien. Elle admet que sur tous ces hommes, un seul lui a demandé pourquoi elle voulait se prendre en photo avec lui : « Ils ne sont pas du tout méfiants parce qu’ils trouvent ce qu’ils font tout à fait normal ».
En outre, ces publications ne montrent qu’on partie émergée de l’iceberg car parfois, elle ne se sent pas assez en sécurité pour demander à faire un selfie, ou alors le harceleur est déjà parti.
Également, il lui est arrivé de ne pas publier les photos ou de les supprimer, admettant que les remarques sont parfois ambiguës: « La frontière est mince entre remarque sexiste et compliment. Il est difficile d’estimer quand est-ce que je dois faire une photo, et quand est-ce que ça n’en vaut pas la peine. Parfois, je prends la photo puis je la supprime plus tard, parce que ce n’était peut-être pas vraiment sexiste ».
Si elle pourrait « continuer à l’infini », elle a préféré arrêter là. Elle a posté sa dernière photo le 29 septembre dernier et aimerait transmettre son compte à d’autres filles, dans différents pays. À Amsterdam, le harcèlement de rue sera puni d’une amende 190 euros à partir du 1er janvier 2018. Une loi qui sera difficile à appliquer selon l’étudiante : « Mais je pense que c’est symbolique, et je trouve ça bien ».