Quatre étudiants américains de l’Université de Caroline du Nord ont mis un point un vernis à ongles capable de détecter la présence de GHB, de kétamine et de Xanax dans un verre. Après avoir réussi à lever quelques millions d’euros afin de finaliser le projet, les créateurs du produit ont l'intention de le commercialiser courant 2017.
Lorsque l’on est une femme, difficile de faire fi des nombreuses agressions auxquelles nous sommes exposées chaque jour. Si certaines se tournent vers des cours d’autodéfense, d’autres adaptent leurs tenues avant de sortir, de peur de se retrouver nez à nez avec un agresseur potentiel. Cette situation qui devrait être anormale fait pourtant partie de notre lot quotidien. Conditionnées à la crainte, nous redoublons d’attention.
Depuis quelques années, de nombreux gadgets « anti-viol » ont été commercialisés afin de nous sentir davantage en sécurité dans les espaces publics. Quatre étudiants ont ainsi songé à un énième produit destiné à nous protéger des éventuelles agressions.
Tyler Confrey-Maloney, Stephen Gray, Ankesh Madan et Tasso Von Windheim sont les quatre étudiants en sciences à l’Université de Caroline du Nord qui sont à l’origine du projet Undercover Colors, ce vernis qui change de couleur au contact du GHB, du Xanax ou encore de la kétamine.
Imaginée en 2014, l’idée a fait beaucoup parler d’elle, si bien que deux ans plus tard, les créateurs du vernis ont réussi à lever près de 5,5 millions d’euros afin de lancer la production du prototype. À l’heure actuelle, il est prévu que le produit soit commercialisé d’ici l’année prochaine.
En quoi consiste ce vernis « anti-viol » ? C’est très simple : il suffit de tremper votre doigt verni dans votre verre : si le vernis change subitement de couleur, c’est que le verre que l’on vous a servi est composé de drogues.
Le produit peut donc s’avérer être une arme redoutable et efficace afin de se protéger d’une agression sexuelle : mieux encore, il peut sauver des vies. L’un des créateurs du vernis affirme vouloir inverser la donne et « faire passer la peur du camp des victimes à celui des agresseurs ». Et lorsque l’on connaît les chiffres du viol, nous avons toutes les raisons de nous inquiéter. D’après une étude réalisée à l’Université de Brown, dans l’État de Rhode Island, une femme sur six a déjà été violée lorsqu’elle se trouve en état d’ébriété ou dans l’incapacité de se défendre lors de sa première année universitaire aux États-Unis.
Ces chiffres alarmants ont été mis en évidence suite à l’affaire du « violeur de Stanford », une affaire qui a fait couler beaucoup d’encre et qui a brisé le tabou de la question de la culture du viol, très ancrée au sein des campus américains. Brock Turner, ancien étudiant et champion de natation de l’Université de Stanford, n’a écopé que de six mois de prison, dont trois fermes après avoir violé une jeune femme alors qu’elle était inconsciente. Une condamnation légère et insuffisante qui a profondément choqué le monde entier.
En France aussi, la question du viol doit être plus que jamais au cœur de nos considérations. D’après le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, 16% des femmes interrogées déclarent avoir déjà subi des viols ou des tentatives de viol au cours de leur vie.
Ces chiffres très préoccupants doivent également nous inciter à nuancer l’intérêt de l’apparition de cette vague de gadgets anti-viol. Vernis anti-GHB, bracelets connectés, pantalons géolocalisables, collants à poils, censés rebuter les agresseurs… il existe de nombreux produits destinés à éloigner les violeurs potentiels, mais dans l’absolu, ces outils de défense, au lieu de régler le problème, ne font que le contourner. En incitant les femmes à se protéger, ne passons-nous pas à côté de l’essentiel ? Et si c’était aux potentiels agresseurs de prendre leurs responsabilités ? Et s'il fallait les sensibiliser davantage ?
À l’instar du dessinateur de BD Monsieur Q, qui nous a gratifiés il y a quelques jours d’un dessin criant de vérité sur le sujet ou encore de la blogueuse américaine et militante féministe Glosswatch, rendons-nous à l’évidence : ce n’est pas aux femmes de se préparer aux risques d’un viol et de considérer que les agressions sont des actes inévitables, comme s’il s’agissait d’une simple averse ou bien d’une mauvaise grippe.