Découvrez l'histoire qui se cacherait derrière l'un des plus célèbres romans de la littérature.
Sorti dans les salles obscures fin juin, « Le Comte de Monte-Cristo » connaît un démarrage fulgurant, à la hauteur du budget investi (43 millions d'euros).
La nouvelle adaptation cinématographique du chef-d'œuvre d'Alexandre Dumas (1802-1870) a ainsi dépassé les 3 millions d'entrées en à peine 15 jours d'exploitation. Réalisé par Alexandre De La Patellière et Matthieu Delaporte, le film, qui met en vedette Pierre Niney, Anaïs Demoustier et Vassili Schneider, est en passe de devenir l'un des plus gros cartons de l'année 2024.
Comme il fallait s'y attendre, ce succès profite aux... librairies, lesquelles sont désormais dévalisées par de nombreuses personnes qui, après avoir vu le long-métrage, se ruent sur le livre pour (re)découvir les aventures d'Edmond Dantès.
Et parmi ces lecteurs, il y en a sûrement pléthore qui ignorent que ce roman, devenu au fil du temps l'une des plus grandes œuvres de l'histoire de la littérature, serait en réalité inspiré d'une histoire vraie ; celle d'un certain François Picaud.
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L'historie derrière le Comte de Monte-Cristo
C'est en découvrant la vie tragique de ce jeune homme, victime d'une odieuse machination sous le Premier Empire, qu'Alexandre Dumas a en effet eu l'idée d'écrire ce récit qui allait passer à la postérité.
Après avoir eu vent de cette histoire grâce à son collaborateur Auguste Marquet - qui avait déniché ce fait divers dans les archives de la police - l'écrivain s'est donc inspiré de faits (supposés) réels en les adaptant à une époque coïncidant au règne de Louis XVIII et au retour de captivité de Napoléon. Dumas a également fait le choix de déplacer l'intrigue à Marseille alors que le récit originel se déroulait à Paris.
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L'histoire de François Picaux - également connu sous le nom de Pierre Picaud - débute en 1807 lorsque ce jeune cordonnier originaire de Nîmes (Gard), où il est né en 1780, débarque dans la capitale pour tenter sa chance. Sérieux et travailleur, François se fait vite un nom dans son milieu et son physique, que l'on dit avantageux, n'est pas pour déplaire aux jeunes femmes. Assez courtisé, il jette finalement son dévolu sur une certaine Marguerite Vigoroux, une demoiselle fortunée qu'il aime éperdument et qu'il doit bientôt épouser. À l'aube de ses 30 ans, François semble plus épanoui que jamais. Heureux dans son travail, il s'est élevé socialement et s'apprête à s'unir à une riche parisienne.
Hélas, comme toujours, ce genre d'ascension sociale ne plaît pas à tout le monde et, bientôt, des jalousies naissent dans son entourage. Et ce qui devait arriver arriva. Deux jours avant la noce, alors qu'il se rend dans une taverne, François Picaud est piégé par un quatuor de gredins, avec à sa tête un certain Loupian, un aubergiste lui aussi amoureux de Marguerite. Ce dernier est épaulé dans sa sombre besogne par un homme nommé Antoine Allut ainsi que par deux autres personnes, connues sous les noms de Chaubard et Solari. Jaloux de la réussite de ce jeune provincial qu'ils méprisent, les quatre malfaiteurs le dénoncent à la police impériale en l'accusant d'être un espion royaliste. Des allégations, bien sûr, totalement fausses.
Arrêté, Picaud est ensuite emprisonné pendant 7 ans dans le château de Fenestrelle, situé dans le Piémont italien. Durant sa captivité, le cordonnier sympathise avec son co-détenu, un richissime abbé milanais enfermé à vie, qui le prend sous son aile, puis lui lègue toute sa fortune, disséminée dans plusieurs banques d'Europe. Libéré en 1815 lors de la Restauration, Picaud récupère tout l'argent de son mentor et devient immensément riche du jour au lendemain. Libre de faire tout ce qu'il désire, Picaud, qui se fait désormais appeler Joseph Lucher, élabore alors un plan machiavélique pour se venger des quatre scélérats qui l'ont envoyé au cachot. Tiens, tiens, ça ne vous rappelle rien ?
François Picaud, le véritable Edmond Dantès ?
De retour à Paris, Picaud alias Lucher aurait ensuite mis ce plan à exécution après avoir appris que Loupian avait fini par épouser celle qui lui était pourtant promise. Il aurait d'abord tué Chaubard, non sans annoncer la suite de son projet en gravant un numéro sur l'arme du crime. Ensuite, après avoir empoisonné Solari, il aurait fait condamner le fils de son rival Loupian à de la prison avant d'incendier son café, acheté grâce à la... dot de Marguerite, décédée peu de temps auparavant. Ruiné et seul après l'incendie de son établissement, Loupian aurait finalement été assassiné par un domestique. Un acte commandité, dit-on, par Picaud.
Quant au dénommé Allut, il aurait eu plus de chance que ses complices. Car si Picaud aurait œuvré pour l'envoyer aux galères, l'intéressé aurait tout de même survécu aux travaux forcés et serait revenu en France pour traquer son ennemi, qu'il finira par assassiner. Dans la foulée de ce meurtre, Antoine Allut aurait fui vers l'Angleterre où il aurait rendu son dernier souffle, en 1828. Sur son lit de mort, Allut - sans doute pris de remords - aurait confié toute cette histoire de vengeance au prêtre français lui administrant l'extrême onction. Et c'est ce dernier qui aurait ensuite raconté les faits à la police parisienne.
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Si l'histoire de François Picaud a longtemps été reconnue comme étant le fait divers ayant inspiré le Comte de Monte-Cristo, elle est aujourd'hui remise en cause par certains spécialistes qui doutent de sa véracité. Pour bon nombre de ces derniers, le personnage de François ou Pierre Picaud ne serait en effet qu'une pure invention née de l'imagination du faussaire Étienne-Leon Lamothe-Langon (connu pour ses mémoires apocryphes) dans le but de romancer les archives de la police.
En revanche, des recherches ultérieures effectuées par des généalogistes ont démontré la possibilité que Lamothe-Langon se soit en réalité inspiré d'un personnage bien réel, appelé Gaspard-Étienne Pastorel, un forçat qui fut emprisonné, à tort, et dont l'histoire présenterait de fortes similitudes avec le parcours romanesque d'Edmond Dantès. Mais là encore, difficile d'en avoir la certitude.
Le mystère demeure donc entier.