Même si le syndrome de Paris ne figure pas dans le DSM ou « Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux », il s’agit d’un phénomène bien réel.
C’est quoi le syndrome de Paris ?
Fontaine de la Concorde à Paris Crédit : ribeiroantonio
Intégrant la liste des plus belles villes d’Europe et du monde entier, Paris est un lieu touristique très apprécié. Toutefois, certains touristes sont incapables de profiter de la capitale française. Ils souffrent de vomissements, de nausées ou d’autres hallucinations. En effet, ils sont sujets au syndrome de Paris, quasi similaire aux syndromes de Jérusalem et de Stendhal.
Le syndrome de Paris touche généralement les touristes japonais. Deux raisons peuvent être à l’origine de ce trouble :
- La culture japonaise est complètement différente à celle de Paris ;
- La croyance et le système de développement du Japon et de Paris n’ont aucune ressemblance.
D’après un professeur de sociologie, Mathieu Deflem de l’Université de Caroline du Sud, la culture japonaise aurait une vision romancée de la ville de Paris. Ce fait est le résultat des représentations de Paris dans de nombreux films et des livres comme :
- Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain (2001) ;
- Proust au Majestic ;
- Paris est une fête.
D’après une étude effectuée par Condé Nast Traveler durant l’année2014, Paris devient une ville hostile. La capitale française se trouve au quatrième rang sur le plan mondial.
Selon une étude réalisée par le magazine CEOWORLD, Paris se situe en tête des villes les plus grossières de l’Europe. En outre, la capitale n’est pas très conviviale par rapport aux expatriés.
Si le Japon a une culture bien ordonnée et polie, Paris a changé et est devenu une ville plus populaire. Les différences culturelles et les attentes non satisfaites expliqueraient pourquoi certains touristes ne s’y sentent pas à l’aise.
Le syndrome de Paris est en effet une forme de choc culturel. Les symptômes associés à ce syndrome ressemblent à ceux ressentis en cas d’anxiété. Sachez que ce sentiment est associé à une sorte de crainte dans certaines occasionsou suite à un changement de vie/environnement. Par conséquent, des signaux sont envoyés à l’estomac, ce qui modifie la manière dont le système digestif fonctionne. Le sujet risque donc de souffrir de nausées, de vomissements, de désorientation, etc.
Syndrome de Paris : quelles en sont les causes ?
Photo d’un homme déprimé rencontrant un psychologue Crédit : Maria Korneeva
La principale cause du syndrome de Paris est la déception. Dans un article sorti en 2004, Hiroaki ÔTA disait : « La déception liée au contact avec la réalité quotidienne est aussi un facteur d’incompréhension et d’angoisse, mais aussi de désillusion et de dépression. L’image stéréotypée de Paris, ville de consommation de produits de luxe, largement véhiculée par les sources d’information, ne résiste pas à la quotidienneté : nous ne sommes pas tous et toutes habillés chez les grands couturiers, notre vie n’est pas seulement oisive et culturelle, la politesse, le raffinement, la galanterie “ont fait long feu” »
- En France, la barrière linguistique est une source d’angoisse et d’isolement pour de nombreux touristes. Pour un japonais perdu en plein milieu de Paris, elle provoque un sentiment d’étrangeté. Elle amplifie également les différences de culture. En outre, les interventions directes, excessives et excentriques ne font que déconcerter les touristes japonais.
- À part le choc des cultures, d’autres facteurs déclenchent le syndrome de Paris, par exemple l’impolitesse des Parisiens. La saleté dans la ville influe également sur l’état de certains patients. Les vols à la tire sont également un facteur de déclenchement du syndrome de Paris selon Rodolphe Oppenheimer, psychothérapeute et psychanalyste.
- L’image idéalisée de Paris est aussi un facteur de ce trouble. L’incapacité d’une personne à concilier la différence entre la réalité parisienne et l’image popularisée au Japon provoque souvent le syndrome.
- Un voyage de vacances ou d’affaires peut être épuisant. Une journée surchargée peut également devenir une source de stress avec le décalage horaire. Un mauvais rythme quotidien provoque ainsi à la déstabilisation psychologique.
Selon le président de l’Association médicale franco-japonaise, Mario Renoux, les magazines japonais tiennent une grande responsabilité dans la création de ce trouble. En effet, ces médias japonais représentent Paris comme un lieu où les habitants ressemblent à des mannequins et que la plupart des femmes portent des vêtements de haute couture. Cependant, les grandes marques vestimentaires françaises ciblent principalement les consommateurs étrangers. En outre, la population française est en surpoids par rapport à la population japonaise.
Comment guérir le syndrome de Paris ?
La ville de Paris avec la tour Eiffel Crédit : Pascale Gueret
Le syndrome de Paris ne touche pas uniquement les Japonais et les Japonaises. Des Américains et des Australiens en sont aussi victimes. Rodolphe Oppenheimer confirme qu’ils subissent des attaques de panique ainsi que des angoisses très fortes. Les personnes touchées ont même l’impression de disparaître, mais tout cela reste sans séquelles. Le praticien dit également que le fait de parler de la ville de Paris en divaguant, les sueurs froides et les étourdissements, les hallucinations, etc., sont des symptômes du syndrome de Paris.
Rodolphe Oppenheimer traite le syndrome de Paris par la paroledit-il :
« Ils se disent “je fais un AVC”, on leur explique que ce sont des choses que nous connaissons référencées, on les rassure sur la santé. Ça se traite comme une phobie. »
Aujourd’hui, ce syndrome est pris en charge. Des sociétés japonaises se déplacent en France pour traiter les patients. Pour les visiteurs développant ce trouble, la meilleure solution est de quitter Paris, un traitement radical, mais efficace. Il n’existe aucun médicament pour traiter ce trouble.
D’autres syndromes du voyageur
Couple en voyage, souffrant de maux d’estomac Crédit : Prostock-Studio
Le syndrome du voyageur figure parmi les troubles psychiques. Il est passager et concerne les voyageurs qui n’arrivent pas à confronter la réalité dans un pays avec leur imagination. Notez toutefois que le syndrome du voyageur n’est pas semblable au voyage pathologique. Pour ce deuxième cas, un contexte psychiatrique motive la victime pour son voyage.
De nombreux symptômes caractérisent le syndrome du voyageur : état délirant aigu, hallucination, sentiment de persécution, etc. La dépression, la déception, la déréalisation, l’anxiété et la dépersonnalisation sont des formes de manifestation d’un syndrome du voyageur.
Parmi les syndromes les plus fréquents, il est possible de citer :
- Le syndrome de Jérusalem ;
- Le syndrome de l’Inde ;
- Le syndrome de Stendhal.
Le syndrome de Jérusalem
Le Mur des Lamentations Jérusalem Crédit : VanderWolf-Images
Le syndrome de Jérusalem est une sorte de psychose aiguë similaire à celle du syndrome de Stendhal. Toutefois, elle ne fait pas référence aux œuvres d’art, mais notamment au sens religieux.
Le directeur de l’hôpital psychiatrique Kfar Shaul, le docteur Yair Bar-El, a diagnostiqué ce syndrome en 1993. Depuis cette découverte, il prend en charge les crises liées à la déception dans la terre sainte.
Des pèlerins rêvent de réaliser une visite en terre sainte. Toutefois, la richesse archéologique de Jérusalem concerne les périodes turque, musulmane, croisée et byzantine. La trace de l’ère préchrétienne est donc très rare, car la plupart des sanctuaires chrétiens et juifs avaient été détruits lors des évènements qui se sont succédé dans la région.
Comme la réalité sur terrain n’est pas du tout celle que les visiteurs avaient en tête, ils sont frustrés et risquent le syndrome de Jérusalem.
Ce problème psychiatrique se manifeste en trois types :
- Type1 : il est superposé à une autre maladie psychotique antérieure.
Soit une identification psychotique liée à des personnages bibliques est constatée, soit le sujet fait des « idées magiques » et fait un lien entre son état santé et les lieux saints, soit il a des problèmes familiaux engendrant une psychose à Jérusalem.
- Type2 : le trouble devient compliqué lorsqu’il est superposé à des idéations idiosyncratiques. Les individus qui appartiennent à un groupe religieux sont les plus concernés.
- Type3 : la forme pure du syndrome concerne les individus n’ayant aucune psychopathologie antérieure.
Sachez que Jérusalem abrite trois religions : judaïsme, islam et christianisme. En outre, nombreuses sont les personnes qui se prennent pour des divinités, des prophètes ou des personnages bibliques. Il est également fort probable que le complexe du Messie se manifeste chez un individu religieux. Après une visite de Jérusalem, ce dernier croit être le sauveur.
En général, ce problème psychiatrique se manifeste lors des grands évènements religieux (Noël, Pessah, Pâques, etc.) et durant les périodes chaudes (juillet et août).
Le syndrome de l’Inde
Le Taj Mahal Agra en Inde Crédit : Roop_Dey
Régis Airault est le psychiatre qui a découvert pour la première fois ce syndrome. Il occupe un poste au sein de l’ambassade de France située en Inde. Ce problème se manifeste chez des touristes occidentaux qui se rendent dans ce pays asiatique.
La foule, les odeurs, le bruit, les excès du climat, la pauvreté et la différence des cultures sont les principales sources de ce trouble. L’omniprésence de la m*rt ainsi que du mysticisme donne envie à fuir le pays, car certains individus ont du mal à les encaisser.
Tous les symptômes liés au syndrome de l’Inde disparaissent lorsque le patient retourne chez lui.
Le syndrome de Stendhal
Santa Croce, Florence Italie Crédit : Vladislav Zolotov
Magherini a identifié le syndrome de Florence ou de Stendhal en 1992. Il se manifeste comme le syndrome de Paris et de Jérusalem, sauf qu’il concerne les œuvres d’art. Stendhal a déjà décrit ce problème en 1817 après la visite de la basilique de Santa Croce située à Florence. Il disait :
« J’étais dans une sorte d’extase, par l’idée d’être à Florence, et le voisinage des grands hommes dont je venais de voir les tombeaux. Absorbé dans la contemplation de la beauté sublime, je la voyais de près, je la touchais pour ainsi dire. J’étais arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j’avais un battement de cœur, la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber. »