De plus en plus de sans-abri qui dorment dans le métro de Paris ont un travail, selon une récente enquête, dont les résultats ont été publiés ce lundi.
C’est un constat alarmant que celui dressé par l’observatoire du Samu social de Paris !
Refuge habituel des sans-abri et autres marginaux mis au ban de la société, le métro parisien abrite désormais de nombreux travailleurs pauvres, qui jouissent pourtant d’un emploi rémunéré.
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« Le public a changé, en particulier avec l’augmentation de la part des travailleurs précaires »
C’est en substance ce que nous révèle une enquête, menée conjointement par la RATP et l’observatoire du Samu social entre décembre 2018 et août 2019.
On y apprend notamment que les sans-abri se réfugiant dans le métro pour y dormir sont à 82 % des hommes seuls, francophones et âgés de 46 ans en moyenne. Un tiers de ces derniers déclare pourtant avoir des revenus.
Paramètre nouveau et ô combien inquiétant, 20 % des personnes sondées tirent leur revenu d’un emploi et 6 % de leur retraite. Seuls 3 % bénéficient du chômage.
« Le public a changé, en particulier avec l’augmentation de la part des travailleurs précaires, qui font un autre usage du métro. Ils y passent la nuit mais travaillent la journée ou l’inverse », explique ainsi Odile Macchi, sociologue au sein de l’observatoire du Samu social.
On constate également une présence accrue de jeunes retraités, victimes de la baisse significative de leurs revenus. Beaucoup n’ayant plus les moyens de payer leur logement.
On trouve également des jeunes en rupture familiale ou encore des personnes souffrant de maladies qui sont des victimes collatérales du « phénomène de saturation des établissements hospitaliers ».
Au total, 714 sans-abri ont été recensés au cours de l’enquête. Parmi eux, seuls 7 % affirment rester toute la journée dans le métro.
Plus de la moitié déserte en effet le dédale pour regagner la surface afin de se nourrir, faire ses besoins et laver le linge.
Ce qui montre que bon nombre de personnes marginalisées, ou considérées comme tel, ne sombrent pas dans l’isolement total, ni dans un syndrome d’« enfouissement » qui peut provoquer une perte de la notion du temps.
« Ça n’est pas parce que l’on vit depuis longtemps dans le métro qu’on est forcément désocialisé », confirme Odile Macchi.
De manière générale, « le nombre de personnes qui dorment dans le métro est variable, entre 200 et 350 par nuit en moyenne, et il y a une corrélation forte avec la température extérieure », explique pour sa part Emmanuelle Guyavarch, responsable de la mission de lutte contre la grande exclusion à la RATP.
Si l’on en croit les résultats de l’enquête, ces sans-abri traversent une longue période d’errance, puisque plus d’un quart est sans logement depuis au moins dix ans, près de la moitié depuis au moins cinq ans et les trois quarts depuis plus d’un an.
Plus de 30 % des sans-abri du métro déclarent être « en mauvais ou très mauvais état de santé ». À titre de comparaison, ils étaient deux fois moins dans la précédente enquête du genre, réalisée par l’Insee en 2012.
Un tiers des sans-abri interrogés déclare consommer de l’alcool plus de quatre fois par semaine, et un quart d’entre eux a reconnu avoir pris de la drogue dans les douze mois précédents (du cannabis dans 20 % des cas et de la cocaïne ou du crack dans 14 % des cas).
Notons que près de 2 500 personnes différentes ont été identifiées comme dormant dans les sous-sols du métro, en 2018. Une population de sans-abri toujours plus forte et c'est la raison pour laquelle deux maisons solidaires vont ouvrir dans les prochains jours à Clichy-la-Garenne et à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), afin d'accueillir 140 personnes à la rue.
L'ouverture de ces hébergements était une promesse faite par la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse.