Vous le savez certainement : le Super Bowl est l’un des évènements sportifs les plus importants des États-Unis. Comme il est de coutume chaque année, le président présente ses félicitations à l’équipe victorieuse du championnat à la Maison Blanche. Mais, ces derniers mois, on a pu observer au pays de l'Oncle Sam un sentiment grandissant de défiance à l'encontre de Donald Trump, mais aussi de la discrimination raciale qui sévit actuellement aux États-Unis dans le petit monde du sport. Ce mouvement se perpétue puisque trois joueurs des Eagles de Philadelphie, gagnants du Super Bowl 2018, ont d’ores et déjà affirmé qu’ils ne se rendraient pas à Washington pour recevoir les congratulations du président.
L’affaire avait fait grand bruit en 2016. En guise de protestation contre les violences policières à caractère raciste, le footballeur américain de la National Football League en poste chez les 49ers de San Francisco Colin Kaepernick posait un genou au sol pendant l'hymne de son pays, témoignant son soutien aux minorités opprimées dans un contexte d’ascension de l’extrême-droite aux États-Unis. Ce geste a rapidement été encouragé, célébré, au point que la revue Sports Illustrated adresse le Muhammad Ali Legacy Award à Kaepernick en novembre dernier. D’autres se sont insurgés contre ce geste symbolique, le jugeant irrespectueux — notamment le président Donald Trump qui n’a pas mâché ses mots :
« Est-ce que vous n’aimeriez pas voir un de ces propriétaires de la NFL dire, quand quelqu’un manque de respect à notre drapeau, « sortez-moi ce fils de pute du terrain, il est viré, il est viré ! » ? ».
Colin Kaepernick, premier sportif a avoir ployé le genou pendant l'hymne national, en a payé le prix de sa carrière, boycotté depuis par tous les grands clubs américains. Crédit photo : Mike McCarn, AP
Si Colin Kaepernick est devenu un symbole, au point d'être par la suite imité par plus d’une centaine de joueurs à travers le pays qui ont également ployé le genou pour lui exprimer leur soutien, le jeune homme à présent âgé de trente ans s’est retrouvé sans équipe, purement et simplement boycotté par tous les grands clubs américains.
Comme nous vous le disions il y a quelques mois, beaucoup de propriétaires de franchises ont alors condamné les propos de Donald Trump, eux qui sont d’ordinaire très proches de la Maison Blanche et de ses positions, en sachant que 70 % des joueurs de la NFL sont afro-américains. Donald Trump a alors prié instamment la NFL de suspendre ou de renvoyer tout joueur qui s’agenouillerait.
En septembre 2017, c’est la NBA qui a annoncé sanctionner tout joueur de basket qui plierait le genou pendant l’hymne national, tentant d’étouffer par là même toute forme de rébellion contre le pouvoir politique en vigueur. Le président américain a ensuite annulé la visite à la Maison Blanche des Golden State Warriors suite aux propos du joueur Steph Curry, qui avait largement sous-entendu qu’il était impensable pour lui de se rendre là-bas compte tenu des circonstances actuelles.
Philadelphia Eagles safety and Super Bowl champion Malcolm Jenkins says, "I personally do not anticipate attending (a victory event at the White House)" https://t.co/y3iENKNvfu pic.twitter.com/kLZa2Wq2Vr
— New Day (@NewDay) 5 février 2018
Si la NBA redouble d’efforts pour faire taire ses joueurs, les footballeurs américains de la NFL continuent de défier Trump et ses positions que les minorités américaines jugent pour le moins dégradantes.
Torrey Smith et Chris Long, membres des Eagles de Philadelphie qui ont remporté cette nuit la finale du Super Bowl face aux New England Patriots (44-31), ont clamé haut et fort qu’ils refusaient par avance l’invitation de Donald Trump à la Maison Blanche. Il est pour eux impensable de recevoir les félicitations d’une personnalité aux idées aussi rétrogrades à leurs yeux, qui plus est lorsqu’il s’agit du chef de l’État. L’année dernière, des joueurs de l’équipe des New England Patriots avaient également refusé de se rendre à la Maison Blanche, ce qui n’a fait qu’accroître les tensions entre Donald Trump et les joueurs de la NFL. Malcolm Jenkins a tenu à expliciter les raisons de son refus de se voir félicité par Donald Trump :
« Mon message a été clair toute l’année. Vous savez, je suis en faveur d’un changement positif dans les communautés dont je suis issu, que ce soit à Philadelphie, dans le New Jersey, dans l’Ohio, la Louisiane, ou dans le pays entier. Je veux voir du changement dans notre système judiciaire. Je veux nous voir lutter en faveur de l’avancée économique et éducative dans les communautés non-blanches et à faibles revenus. Et je veux voir les relations entre nos communautés et les forces de l’ordre s’améliorer ».