À partir du 1er janvier 2018, onze vaccins seront obligatoires pour les enfants — contre seulement trois auparavant.
La ministre de la santé, Agnès Buzyn, a annoncé hier matin que le gouvernement ne souhaitait rendre effective cette nouvelle mesure que l'année prochaine, afin de laisser le temps aux familles de se mettre à jour. «Il est hors de question de pousser les gens à vacciner leurs enfants dans l'urgence », a-t-elle expliqué sur la chaîne d'information en continu CNews.
L'annonce de ces nouveaux vaccins obligatoires, en juillet, avait suscité la colère des parents réfractaires, et relancé le débat opposant anti et pro-vaccination.
Un enfant vacciné par un pédiatre / Shutterstock
Actuellement, en France, seuls trois vaccins sont obligatoires pour les enfants. C'est le fameux trio DTP (diphtérie, tétanos et poliomyélite). Les huit « nouveaux » vaccins n'étaient, jusqu'ici, que fortement recommandés par les médecins — mais concrètement, une grande majorité d'enfants ont déjà été vaccinés : il s'agit des vaccins contre la coqueluche, la rougeole, les oreillons, la rubéole, l'hépatite B, l'haemophilus influenzae, le pneumocoque, et le méningocoque C.
Alors, pourquoi vouloir aujourd'hui rendre ces vaccins obligatoires, si la plupart des parents ont déjà fait vacciner leurs enfants ? Tout simplement parce que les professionnels de la santé craignent, justement, que les 15% d'enfants qui ne sont pas encore vaccinés ne finissent par mettre en danger les autres, en favorisant la réémergence d'épidémies mortelles.
En effet, pour qu'un vaccin soit efficace, il faut qu'une partie importante de la population soit vaccinée, étant donné que, pour survivre et se développer, les virus et bactéries responsables des maladies infectieuses doivent se répandre en contaminant de nouveaux individus. Lorsqu'une grande fraction de la population est résistante à la maladie, les organismes responsables ne parviennent plus à se reproduire, et finissent par disparaître.
Or, pour parvenir à totalement éradiquer une maladie par le vaccin, il faudrait que 80 à 95 % de la population soit vaccinée, estime l'Agence nationale de santé publique. Si suffisamment de personnes sont vaccinées, cela protège donc aussi les personnes non-vaccinées, puisqu'elles se retrouvent à leur tour moins exposées à de potentiels agents infectieux : c'est ce qu'on appelle l'immunité de groupe. Un mécanisme qui permet donc de protéger ceux qui refusent le vaccin, mais aussi (et surtout) ceux qui ne peuvent pas être vaccinés, comme les nourrissons, les personnes fragiles, ou celles qui ont des contre-indications médicales, par exemple.
Ministère de la Santé / Capture d'écran
L'efficacité de la politique du vaccin obligatoire n'est plus à prouver : grâce à ce genre de mesure, la polio, dont le vaccin a été rendu obligatoire en 1958, a été totalement éradiquée en France en l'espace de quelques années. Des résultats extrêmement probants, qui font de la vaccination, avec l'assainissement des eaux, l'une des politiques de santé publique ayant eu le plus gros impact sur la réduction de la mortalité au cours de l'Histoire.
Cependant, ces résultats probants ne suffisent pas à convaincre les parents anti-vaccins. Pour certains, la raison de ce rejet est politique ( ils ne souhaitent pas se voir imposer par l'État la manière de gérer la santé de leurs enfants ), d'autres se méfient des industries pharmaceutiques, dont l'image publique a été entachée de plusieurs scandales médicaux au cours des dernières années. Enfin, un argument fréquemment avancé est la présence d'éventuels effets secondaires. Si la plupart de ces effets sont bénins et concernent peu d'individus (maux de tête, nausées, réactions allergiques...), il existe aussi un risque infime que certains vaccins aient déclenché des symptômes plus graves, bien que cela demeure une simple hypothèse.
Si ces inquiétudes sont compréhensibles et légitimes, un bon nombre d'idées reçues et de mensonges circulent également, le plus souvent propagés par des sites internet anti-vaccin à la crédibilité scientifique douteuse : les rumeurs qui affirment que les vaccins favorisent l'autisme, qu'ils réduisent les défenses immunitaires ou encore qu'ils sont volontairement contaminés par des particules toxiques, ont toutes été maintes fois démontées.
En attendant, si les vaccins vont devenir obligatoires, « l'objectif n'est pas de sanctionner, mais de rendre la confiance aux Français », a affirmé Agnès Buzyn. La ministre se dit prête à envisager une clause d'exemption pour les parents « objecteurs de conscience » et farouchement opposés à la vaccination, quelle qu'en soit la raison.