Et pourtant, en 1525, la totalité de la flotte des baochuan ( les «bateaux-trésors » de la dynastie Ming) avait été détruite, brûlés dans leurs ports, sabordés ou simplement laissés à pourrir sur place.
Green Dragon Society
Les Chinois étaient prêts à accomplir la circumnavigation du globe, ils auraient été capables d'accomplir le premier tour du monde plusieurs décenies avant les Européens, mais au lieu de cela la Dynastie Ming se replia sur elle-même et entra dans une période de stagnation qui dura 200 ans.
En Occident, peu de personnes réalisent à quel point la Chine était économiquement et technologiquement avancée au quinzième siècle, comparée aux autres grandes puissances de son temps. Et de fait, on n'apprend pas trop ça dans les programmes d'école. Pour faire simple, la supériorité de la Chine était écrasante sur tous les niveaux. Tenez, rien qu'au niveau de la flotte de guerre, puisque c'est de cela qu'on parle, certains vaisseaux chinois atteignaient les 120 mètres de long (en guise de comparaison, la Santa María de Christophe Colomb ne mesurait que 19 mètres).
Le gros bateau, c'est celui de Zheng He. Le petit rafiot à côté, c'est une réplique à l'échelle de la caravelle utilisée par Christophe Colomb...
Via Muslim Heritage
Si l'on en croit les rapports de l'époque, certains navires de la Flotte-Trésor Chinoise pouvait avoir plusieurs étages, jusqu'à 9 mâts, douze voiles, des balcons et des salles luxueuses pour les quartiers-maîtres, avec un équipage qiui pouvait atteindre les 1 500 personnes.élevaient du bétail à bord pour leurs longs trajets, de sorte qu'ils étaient de véritables villes flottantes.
Lors de l'une des expéditions maritime de la dynastie Ming, un groupe de 317 de ces titanesques bateaux mirent les voiles en même temps — imaginez un peu le spectacle imposant que cela devait être....
Via Allday
Sous le commandement du grand amiral Zheng He, eunuque chinois musulman (oui) et grand explorateur, dont le nom est toutefois beaucoup moins connu que celui de Christophe Colomb chez nous, la flotte chinoise accomplit de nombreux voyages, explorations et expéditions.
Des découvertes qui auraient pu facilement permettre à la Chine de conquérir le monde et d'asseoir un contrôle sans partage sur toute la planète...
Représentation du grand amiral Zheng He / Via Caravan Daily
Plusieurs décennies avant même que Christophe Colomb ne tète son premier biberon, Zheng He faisait des voyages de routine en faisant des allers-retours de la Chine jusqu'en Afrique.
L'amiral Chinois Zheng He fait même partie d'un culte religieux qui existe encore aujourd'hui sur le nord de l'île de Java, en Indonésie, où il est considéré comme une sorte de divinité. Et de nombreux historiens pensent, même s'il ne s'agit là que de théories, qu'il aurait déjà découvert la côte ouest des États-Unis, l'Australie et même l'Antarctique bien longtemps avant les expéditions Européennes !
/ Wikipedia commons
Bref, sur les mers, la Chine était toute-puissante et dominait largement les flots... Et pourtant, au lieu de conquérir le monde, de coloniser ces nouvelles terres et de devenir les maîtres de la planète, les Chinois ont préféré détruire leurs bateaux et décider d'arrêter toutes leurs expéditions vers l'Ouest. En 1470, le gouvernement détruisit tous les écrits attestant des exploits et des expéditions de Zheng He, afin que ses expéditions ne puissent pas être répétées. Et, en 1525, tous les nativres de la Flotte-Trésor avaient été détruits.
Mais pourquoi ?
À ce sujet, les historiens ont tout une panoplie d'explications plausibles. Selon certains, l'empire chinois était embourbé dans une guerre avec les Mongols sur la terre ferme, un conflit coûteux pour lequel il était inutile de disposer d'une imposante marine de guerre. L'effeort de guerre aurait alors été dirigé en priorité vers les unités terrestres, au détriment de l'entretien de ces coûteux bateaux qui auraient finis par se dégrader et pourrir sur place. D'autres pensent que les coûts exhorbitants de la Flotte-Trésor n''étaient pas du tout rentables en comparaison des butins et des produits rapportés par les expéditions.
Mais ces théorie n'explique pas tout : il semble, en effet, qu'il y ait eu un effort conscient de la part de l'élite politique de l'époque pour volontairement détruire des bateaux et détruire tous les document techniques relatifs à la marine et aux expéditions,comme si on avait voulu rendre plusdifficile la mise en place de nouvelles grandes expéditions dans le futur, comme pour mettre des batons dans les roues des aspirants navigateurs en leur rendant la tache plus compliquée.
C'est pourquoi Angus Deaton, économiste et prix Nobel, cité par Business Insider, propose une théorie différente : selon lui, les Chinois auraient détruit leur flotte... pour tenter de contrôler le commerce avec l'étranger — en clair, parce qu'ils avaient peur.... du libre-échange.
Plutôt ironique lorsqu'on voit que, 500 ans plus tard, la Chine fait aujourd'hui figure de figure phare de la mondialisation et du libre-échange, et qu'elle cherche à tout prix à garder des accords commerciaux le plus ouverts possible, tandis que c'est l'Occident qui commence à vouloir protéger son économie interne.
En fait, selon lui, la Flotte-Trésor a été littéralement sabordée par les élites politiques qui se trouvait alors à la cour de l'Empereur, et qui ont commencé à s'inquiéter de l'émergeance d'une toute nouvelle classe sociale de très riches marchands qui mettaient en péril leur pouvoir. « Les empreurs de CHine, inquiets par la menace que représentait le pouvoir et l'influence grandissante des grands marchands, ont décidé de bannir les grands voyages maritimes vers 1430, afin que les explorations de l'Amiral Zheng He n'aient pas de suite. »
Voilà comment, selon Angus Deaton, la Chine en serait venue à se retracter et à s'enfermer sur elle-même... permettant à la révolution industrielle d'émerger en Europe occidentale, près de trois siècles plus tard.
Vous imaginez à quel point le monde aurait été différent, si les explorateurs Chinois avaient décidé d'envoyer des colons dans les terres qu'ils avaient découvertes (comme l'ont fait les Espagnols et les Portugais), s'ils avaient poursuivi leurs découvertes et qu'ils les avaient utilisées pour contrôler le monde, bien longtemps avant que les Européens n'aient été suffisemment avancés technologiquement pour le faire ?
On parlerait sûrement mandarin aux Amériques, en Australie... Et dans une bonne partie de l'Afrique. Comme quoi, le cours de l'histoire ne tient parfois qu'à un fil... À méditer...