Des chercheurs américains envisagent de développer un traitement consistant à contraindre les cellules cancéreuses à s'autodétruire. Une alternative crédible à la chimiothérapie ?
Pousser les cellules cancéreuses au suicide plutôt que d’essayer de les anéantir par la chimiothérapie. L’idée peut paraître saugrenue mais elle est pourtant très sérieuse et émane d’éminents spécialistes américains.
Cette nouvelle arme éventuelle dans la lutte contre le cancer est à mettre au crédit d’une équipe de chercheurs de la Northwestern University de Chicago. Ces derniers affirment en effet avoir trouvé le moyen de contraindre les cellules malignes à s’autodétruire, comme le rapporte le site « Sciences et avenir ».
Dans une récente étude publiée dans les revues eLife et Nature Communications, on apprend ainsi que des travaux, menés sur les molécules activées par les cellules lorsque ces dernières régulent l’expression des gènes, ont permis de déterminer l’existence d’une molécule singulière, qui pourrait à l’avenir être utilisée comme une alternative crédible à la chimiothérapie.
Contraindre les cellules cancéreuses à s’autodétruire
Dit comme ça, cela peut paraitre abstrait mais c’est en réalité très simple. Explications : il faut savoir que de nombreuses cellules non fonctionnelles naissent quotidiennement dans notre organisme et que ces dernières peuvent acquérir à terme des propriétés dangereuses et se multiplier, ou encore échapper à notre système immunitaire. Un mécanisme qui peut engendrer un cancer.
Mais, dans le même temps, nos cellules ont également la capacité de détecter leur non-fonctionnalité et activer ainsi des gènes entraînant leur autodestruction. C’est ce que l’on appelle l’apoptose, ou mort cellulaire programmée. Ce processus se déroule de la manière suivante : les cellules activent des micro-molécules appelées ARN interférents et celle-ci provoquent de fait la destruction.
Seulement voilà, les cellules cancéreuses qui mutent on la faculté de bloquer les séquences génétiques permettant d’activer l’apoptose. Ces séquences peuvent certes être réactivées « artificiellement » à l’aide de la chimiothérapie, mais ce traitement lourd aux effets indésirables s’attaque aussi aux cellules saines et fonctionnelles. Vous avez bien tout compris ? Parfait, fin de cette parenthèse digne d’un cours de SVT.
Pour enrayer ce mécanisme susceptible de provoquer un cancer, les chercheurs de la Northwestern University de Chicago ont donc eu l’idée de fixer directement ces fameux ARN interférents sur les cellules cancéreuses. Simple, n’est-ce pas ? Encore fallait-il y penser.
Compléter de manière artificielle les mécanisme naturels de défense
Dans des premiers travaux publiés en 2017, l'équipe a d’abord montré que les cellules cancéreuses mouraient après l’introduction de certains ARN interférents alors que, d’ordinaire, elles ont la capacité de développer des résistances aux traitements censés les anéantir, en se multipliant. L'équipe de Chicago découvre, par la même occasion, qu'il n'y a pas besoin d'utiliser un ARN interférent entier, mais juste un fragment très court composé, de 6 nucléotides (des éléments constitutifs de l'ADN et de l'ARN).
Après l’examen de 4096 combinaisons possibles de cette séquences de 6 nucléotides, les chercheurs ont identifié la plus toxique pour les cellules cancéreuses et il se trouve que cette dernière existe réellement dans notre organisme, mais en quantité insuffisante. L’objectif serait donc de compléter cette séquence artificiellement et permettre ainsi au système immunitaire de lutter plus efficacement contre les cellules cancéreuses.
« Sur la base de ce que nous avons appris au cours de ces deux études, nous pouvons maintenant concevoir des micro ARN artificiels encore plus puissants contre les cellules cancéreuses que ceux développés par la nature », a ainsi déclaré Marcus E. Peter, l’auteur principal de l’étude.
Un espoir donc pour la recherche mais il faudra toutefois s’armer de patience car un tel processus prendra encore de nombreuses années. Pour rappel, le cancer demeure la première cause de mortalité dans le pays, suivi de près par les maladies cardiovasculaires.