Les professionnels de l'aide aux personnes âgées et les retraités dans la rue ce jeudi, pour réclamer davantage de moyens

D'un côté les retraités, de l'autre, les personnels des EHPAD et autres professionnels de l'aide aux personnes âgées. En cette journée du 15 mars, les uns se mobilisent pour protester contre la baisse de leurs pensions, tandis que les autres appellent à la grève pour dénoncer leurs conditions de travail dégradées, dues au manque d'effectifs et de moyens. Des revendications et des situations différentes, qui s'inscrivent pourtant sur un même problème de fond : alors que le vieillissement de la population s'accélère et que les citoyens des pays développés vivent de plus en plus longtemps, quelle valeur accordons-nous vraiment aujourd'hui à la prise en charge de nos anciens ?

Photo : Force Ouvrière - Maine-et-Loire

Après une première mobilisation en janvier, tous les salariés au service des personnes âgées sont à nouveau appelés ce jeudi à la grève par une intersyndicale. Si le secteur est déjà en crise depuis un certain temps, le malaise en milieu hospitalier s'est fait particulièrement sentir au cours de ces derniers mois — et tout particulièrement au sein des EHPAD, les maisons de retraites médicalisées pour personnes âgées dépendantes.

L'an dernier déjà, une grève de 117 jours, « la plus longue de France », avait été entamée en avril 2017 dans un EHPAD situé dans le Jura. Là aussi, à cause de conditions particulièrement précaires, et après de nombreux burn-out et démissions. Ce n'est qu'au terme d'un long combat, au départ mené dans l'indifférence quasi générale, que les aides-soignants ont finalement pu obtenir gain de cause, et ont fait largement connaître les conditions de vie et de travail dans les maisons de retraite spécialisées, poussant d'autres à leur emboîter à leur tour le pas.

Épuisés, à bout de souffle, sous-payés, les personnels de ces établissements spécialisés dénoncent depuis longue date des irrégularités, des conditions de travail indignes, mais aussi des actes de « maltraitance institutionnelle » infligés aux patients en raison du manque de moyens humains. Les aides-soignants sont ainsi forcés de faire du rendement, doivent rentrer dans les temps, et sont forcés d'accomplir ce qui s'apparente à du travail à la chaîne qui déshumanise totalement les patients. Dans certains EHPAD, certaines personnes âgées ne bénéficient ainsi que d'une seule douche toutes les six semaines, une situation largement dénoncée par plusieurs syndicats.

Aujourd'hui, pour les professionnels de la santé, la coupe (d'Hygie) est définitivement pleine. Les salariés des EHPAD, mais aussi ceux de l'aide à domicile, des hôpitaux gériatriques, des unités de soins longue durée, ainsi que les personnels des maisons de retraite (non médicalisées) s'unissent ce jeudi, à l'appel d'une dizaine de syndicats. Ils se rassembleront en début d'après midi devant le ministère de la santé, à Paris. Des appels à la grève et aux rassemblements ont été également relayés partout en France. Le mouvement est également soutenu par l'AD-PA, l'association des directeurs au service des personnes âgées.

Une proposition pour doubler le nombre de soignants portée à l'Assemblée

Si les soignants réclament un ratio d'un personnel pour chaque résident dans les établissements en question, et qu'ils demandent également de meilleurs salaires pour le travail très éprouvant physiquement et moralement qu'ils accomplissent (à l'heure actuelle, environ 1 250 euros net par mois, pour des journées de dix heures et deux week-ends travaillés), la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a déjà mis en garde qu'il serait très difficile de satisfaire toutes ces requêtes. Selon elle, la France n'a « pas les moyens budgétaires » de garantir de telles demandes mais elle avait annoncé la semaine dernière le déblocage de 50 millions d'euros supplémentaires pour les établissements en difficulté, somme jugée insuffisante par les syndicats.

Dans un rapport publié ce mercredi et présenté à l'Assemblée, deux députées proposent, entre autres, de multiplier par deux le nombre d'aides-soignants afin d'alléger la charge qui pèse sur les épaules des personnels, tout en permettant d'assurer un minimum de décence et de dignité aux personnes âgées dépendantes.

Le rapport table sur un plan en 4 ans pour atteindre la barre des 60 temps plein minimum pour 100 résidents. Si cette proposition est encore éloignée du ratio 1/1 soutenu par les organisations syndicales, il s'agirait cependant d'une nette amélioration par rapport à la situation actuelle, où on ne dénombre en moyenne que 24,5 aides-soignants et 6 infirmiers pour 100 résidents…

Les retraités également mobilisés

De leur côté, les retraités sont invités à se rassembler partout en France afin de lutter ensemble contre la baisse de leurs pensions. Ils devraient être nombreux à répondre présent à l'appel de neuf syndicats (UCR-CGT, UCR-FO, UNAR-CFTC, UNIR CFE-CGC, FSU-Retraités, Solidaires, FGR, LSR et UNRPA).

En septembre dernier, déjà, plusieurs milliers d'entre eux étaient descendus dans la rue, à travers tout le pays, pour dénoncer la hausse de la CSG, destinée à compenser la suppression des cotisations chômage et maladie du privé.


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