Si l’idée d’ « espionnes célèbres » tient un tantinet de l’oxymore, nombreuses sont les femmes à avoir laissé leur empreinte sur l’histoire de par leurs agissements clandestins, et souvent risqués. Parce que les espionnes ne sont pas cantonnées à n’être que des personnages de fiction au cinéma, souvent représentées en femmes fatales, nous vous proposons de découvrir huit femmes qui ont réellement touché de près à l’espionnage, à l'occasion de la sortie prochaine du film Red Sparrow, avec Jennifer Lawrence dans le rôle principal, celui d'une danseuse qui intègre un service de renseignement.
1 – Mata Hari
Avant d’être un tube de L’Impératrice, Mata Hari est une Néerlandaise née en 1876, sous le nom de Margaretha Geertruida Zelle, qui accepta d’espionner la France pendant la Première Guerre Mondiale pour le compte de l’Allemagne en échange de 20 000 francs, que l’on pourrait qualifier de salutaires puisqu’elle était endettée jusqu’au cou. « Mata Hari », qui signifie « Soleil Levant » en malais, est le nom du personnage de danseuse érotique et exotique que s’est créée Margaretha, et qui a su faire tourner bien des têtes, la faisant entrer dans l’histoire comme l’exemple type de la femme fatale à laquelle nul ne peut résister.
Après avoir accepté la mission d’espionnage confiée par l’Allemagne en 1915, Mata Hari commence à espionner en 1916 le Haut commandement allemand en Belgique pour le compte de la France, devenant ainsi un agent double. Ses activités prennent fin en 1917, lorsque les Français interceptent un message radio permettant son identification. L’espionne est alors arrêtée, et fusillée, non sans avoir au préalable envoyé un baiser volant à ses bourreaux depuis son peloton d’exécution, les yeux bandés, et prononcé ces derniers mots :
« Quelle étrange coutume des Français que d'exécuter les gens à l'aube ! ».
Sa légende n’a cessé de fasciner depuis, comme nous vous l’expliquons en images envoûtantes.
2 – Joséphine Baker
Si le nom de Joséphine Baker est avant tout connu aujourd’hui, c’est bien pour ses pas de danse révolutionnaires qui ont contribué à rendre le swing aussi célèbre. Mais l’image, le prestige, et la notoriété de Joséphine Baker, considérée comme la toute première célébrité afro-américaine, ont été d’incommensurables outils dans sa lutte contre le racisme, le fascisme, et même dans sa résistance contre l’occupant pendant la Seconde Guerre Mondiale. Baker a en effet été naturalisée française en 1937, et c’est pour la France qu’elle a opéré en tant qu’espionne.
Dès 1940, elle s’engage en effet en tant qu’agent des services secrets de la France libre. Joséphine Baker glane pendant quelques années des informations auprès des personnalités qu’elle rencontre en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, alors qu’elle est installée au Maroc. En outre, elle transporte des messages codés dissimulés dans ses partitions musicales, et va même jusqu’à s’enrôler dans les forces féminines de l’armée de l’air.
Travaillant avec la Croix Rouge, elle danse et chante en parallèle pour remonter le moral des troupes. L’ensemble des actions de Joséphine Baker au cours de ce conflit la couronneront de distinctions, parmi lesquelles la médaille de la Résistance française, la croix de guerre, et la légion d’honneur qui lui sera remise par le général de Gaulle.
3 – Marita Lorenz
Née en 1939 en Allemagne, Marita Lorenz était la fille d’un commandant de paquebot et d’une actrice... qui fut également espionne ! Si l’on se souvient de Marita Lorenz aujourd’hui, c’est parce que cette agente de la CIA fut l’amante de Fidel Castro, dirigeant de Cuba, qui fut le tout premier à l’embrasser alors qu’elle n’avait que vingt ans. Le lider maximo reste pour elle « le plus grand amour de [sa] vie »… qu’elle fut chargée d’assassiner par les États-Unis !
Évidemment, comme vous l’aurez compris au regard de la longue vie de Fidel Castro, elle ne parvint pas à accomplir sa mission, prétextant que l’amour qu’elle lui portait fut une extraordinaire source de dissuasion.
Aujourd’hui âgée de 78 ans, Marita Lorenz a eu une liaison avec un autre homme de pouvoir, le président vénézuélien Marcos Pérez Jiménez, duquel elle a eu un enfant.
Jennifer Lawrence a été annoncée comme actrice choisie pour interpréter son rôle dans un biopic, dont nous sommes cependant sans nouvelles depuis bientôt deux ans.
4 – Christine Granville
Christine Granville est le pseudonyme français de l’espionne britannique d’origine polonaise Krystyna Skarbek, qui s’est distinguée par ses missions remplies avec succès en Pologne et en Hongrie pendant la Seconde Guerre Mondiale.
En tant que Christine Granville, elle a aidé la France au cours de plusieurs missions au sein du JOCKEY, réseau d’espionnage britannique soutenant la résistance. Son plus haut fait d’armes reste la mise sur pied d’une opération de sauvetage réussie de son supérieur hiérarchique au sein du JOCKEY, Francis Cammerts, et de deux autres agents retenus prisonniers des Allemands à Diges-les-Bains, le 12 août 1944.
Krystyna mourra assassinée à l’âge de 44 ans en 1952, transpercée par la lame de Dennis George Muldowney, ancien steward rencontré sur un bateau, éperdument amoureux d’elle. Son refus de céder à ses avances aura scellé son destin, Muldowney mettant fin à la vie de l’espionne par désespoir affectif.
La légende raconte qu’Ian Flemming, l’incontournable créateur de James Bond, se serait inspiré d’elle pour créer le personnage de Vesper Lynd, notamment incarnée deux fois à l’écran par deux fantastiques actrices, Ursula Andress et Eva Green, dans les deux adaptations plus ou moins fidèles du roman Casino Royale, respectivement sorties en 1967 et 2006.
5 – Anna Chapman
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Si l’espionnage sous-entend très fortement l’idée de discrétion, dire qu’Anna Chapman en a sérieusement pris le contre-pied ces dernières années tient de l’euphémisme. L’espionne russe au service de Vladimir Poutine a même posé en petite tenue pour la légère revue Maxim ! Les courbes affriolantes d’Anna Chapman, dignes de celles d’une James Bond girl, ont attiré tous les regards sur elle après son arrestation par le FBI en 2010 avec neuf autres personnes.
Fille d’un ancien agent du KGB, son nom anglo-saxon lui vient de son mari britannique, rencontré en 2001 au cours d’une rave party, et qui lui a permis d’obtenir un passeport marqué du sceau de sa Majesté. Après avoir suivi une formation aussi rapide que diverse dispensée par les services secrets russes, comprenant un apprentissage de l’art de faire passer des assassinats pour des accidents et suicides, elle entre au sein du service des renseignements extérieurs de la fédération de Russie, où elle est chargée de se rendre aux États-Unis afin de s’informer sur la stratégie de désarmement nucléaire de Barack Obama en Iran.
Pour ce faire, elle prend l’identité d’une agente immobilière à New York, d’où elle envoie des informations à la Russie depuis une librairie. Le 8 juillet 2010, les États-Unis remettent Anna Chapman à la Russie dans le cadre d’un accord. Les projecteurs du monde entier se braquent sur elle, sa beauté épate et fascine.
Par la suite, elle embrasse une carrière de mannequin, et propose à Edward Snowden de l’épouser sur Twitter, une demande à laquelle l’informaticien américain ne donnera pas suite. De nos jours, elle fait partie du conseil public de l’organisation Jeune Garde, proche du parti de Vladimir Poutine, Russie unie. Autant dire que le parcours de celle qui s’est un jour appelée Anna Kouchtchenko est des plus atypiques !
6 – Nancy Wake
Insaisissable, Nancy Wake a hérité de cette prouesse son surnom de « Souris Blanche », attribué par la Gestapo. À la fin de la Seconde Guerre Mondiale, elle était la femme la plus distinguée, comptant entre autres à son actif la croix de chevalier de la légion d’honneur, en même temps que l’une des plus recherchées par les Allemands, qui ont mis sur sa tête une prime de 5 millions de francs.
Cette Australienne décédée à l’âge de 98 ans en 2011 a aidé le dénommé Ian Garrow à s’évader de la prison de Mauzac en 1942, avant d’être recrutée par le Special Operations Executive britannique qui la parachutera dans la nuit du 29 au 30 avril 1944 en Auvergne pour aider la Résistance à se soulever en lui fournissant des armes, en amont du débarquement de Normandie. Au cours de sa mission, elle a parcouru plus de 200 kilomètres à bicyclette pour trouver un opérateur radio afin de transmettre des messages, passant outre les points de surveillance allemands.
En plus d’avoir accompli de nombreux actes de sabotage, Nancy Wake a été arrêtée et torturée par l’envahisseur allemand en 1943, finalement contraint de la libérer face à son silence persistant, empêchant les soldats ennemis de découvrir sa véritable identité. La liste des exploits de la Souris Blanche n’a d’égal que son incomparable courage.
7 – Ethel Rosenberg
Ethel Rosenberg et son mari, Julius, connurent un destin on ne peut plus funeste. Ce couple new-yorkais était de tendance communiste, dans un contexte de Guerre Froide. Cela va sans dire que cette appartenance politique n’était pas vraiment bien vue aux États-Unis à cette époque. Les deux comparses ont espionné les États-Unis pour le compte de l’Union Soviétique, en fournissant à l’État communiste un grand nombre de documents concernant la bombe atomique, que l’URSS souhaitait élaborer pour continuer à tenir tête au bloc capitaliste dans la course à l’armement nucléaire.
Arrêtés, les époux ont été condamnés à mort, et exécutés sur la chaise électrique en 1953, servant d’exemples pour la « chasse aux sorcières » alors mise en place par le sénateur Joseph McCarthy en 1950. S’ils ont toujours clamé leur innocence, les Rosenberg restent aujourd’hui encore le seul couple à avoir été condamné à mort pour espionnage après la Seconde Guerre Mondiale.
8 – Marthe Richard
La vie d’espionne de Marthe Richard est encore aujourd’hui auréolée de mystère. Mythe ou réalité ? La question se pose tandis que livres et films ont forgé sa légende, parmi lesquels Marthe Richard, au service de la France, sorti en 1937. Décorée de la légion d’honneur en 1935, beaucoup soupçonnent cependant la Française d’être une affabulatrice.
Surnommée « la veuve qui clôt » en raison de la mort de son mari à Verdun en 1916, elle est à l’origine de la fermeture des maisons closes en 1945, d’où le jeu de mots qui est devenu son sobriquet. Ancienne prostituée elle-même, elle a fait partie des toutes premières femmes aviatrices, et affirme être devenue espionne pour le compte du Service de Centralisation des Renseignements après le décès de son mari, grâce à son amant.
Elle aurait rempli diverses missions de juin 1916 à septembre 1917, avant de devenir la maîtresse d’Hans Von Krohn, attaché naval de l’ambassade allemande de Madrid, afin de l’espionner, devenant par là même un agent double. Elle aurait justement connu Mata Hari, également en Espagne, à cette époque. Ses activités au cours de la Grande Guerre auraient été arrêtées par la presse qui aurait divulgué son appartenance aux services secrets.
La légende raconte que durant la Seconde Guerre Mondiale, vexée de la méconnaissance des Allemands de sa carrière d’espionne, elle se serait rendue dans les locaux de la Gestapo et aurait affirmé :
« Messieurs, je suis Marthe Richard, celle qui vous a fait tant de mal au cours de la dernière guerre ».
En 1944, elle rejoint les Forces françaises de l'intérieur, et fait part à tous de ses prétendus exploits. Aujourd’hui encore, la véracité de la carrière d’espionne de Marthe Richard reste le sujet de nombreux débats.
Les espionnes vous fascinent ? Ne manquez pas Jennifer Lawrence dans le rôle de l’agente russe Dominika Egorova dans le film Red Sparrow, dont la sortie en salles est prévue en France le 4 avril 2018 !