Au Canada, un phénomène horrible a lieu dans les régions de l'est, sur les banquises, chaque année à la même période. Des bébés phoques sont massacrés en toute légalité...
Durant les 18 dernières années, Rebecca Aldworth, présidente de l’ONG Humane Society International (HSI), a malheureusement eu l’occasion d’observer d’innombrables scènes de ce genre en assistant à des parties de chasses dans les régions de l’est du Canada. Chaque année, c’est le même manège, les mêmes gestes, et surtout le même massacre.
« Le spectacle que l’on voit est si cruel que la plupart des personnes adultes ne parviennent pas à le regarder en vidéo. J’ai vu des phoques qui avaient reçu des balles dans le visage, qui ont été abandonnés sur la neige, saignant, essayant de s’échapper comme ils le pouvaient, avant d’être achevés. J’en ai vu d’autres, être empalés vivants sur des barres en métal » explique Rebecca.
Et alors que tout ceci semble incroyablement atroce, au Canada, la chasse aux phoques est complètement légale. Les chasseurs ciblent d’ailleurs sans scrupule les phoques les plus vulnérables, comme les bébés, pour leur fourrure. Ils vendent ensuite leur butin à des groupes industriels qui les transforment en manteaux et en autres sortes de vêtements. Si aux yeux de la loi, la chasse est ouverte toute l’année, la plupart des chasseurs préfèrent attendre le printemps pour se mettre au travail. Et pour cause, c’est la période où les bébés naissent. Ceci étant dit, habituellement, le gouvernement canadien interdit la chasse entre début avril et mi-mai. « Il s’agit de la période lors de laquelle les mères mettent bas » précise Rebecca.
Mais cette année, malgré (et en réponse à) cette prohibition, la chasse a commencé bien plus tôt que d’habitude (précisément le 28 mars dernier, ndlr). « Une compagnie appelée PhocaLux a fait pression sur le gouvernement du Canada pour avancer la date d’ouverture de la période de chasse. Ils prétendent vouloir capturer des phoques adultes pour leur viande et leur graisse » explique la présidente de HSI. Si le gouvernement a mis en place des zones protégées dans lesquelles les bébés sont censés pouvoir vivre les premiers moments de leur vie tranquillement, en réalité, rien ne se passe comme prévu. En effet, le dérangement reste très important pour les phoques.
« Il n’y a pas réellement de zone précise et limitée où les mamans donnent naissance. Elles peuvent mettre bas dans des endroits très vastes, sur toute la côte de Terre-Neuve » témoigne Rebbeca, qui en a vu de ses propres yeux. D’autre part, il est aussi impossible de différencier, à l’âge adulte, les mâles et les femelles. Ainsi, les chasseurs (qui, rappelez-vous, disaient s’attaquer qu’à des adultes) peuvent facilement tuer une maman enceinte, et donc retirer la vie à son bébé pas encore né.
« Les mamans phoques qui doivent nourrir leur bébé s’aventurent parfois très loin de leur progéniture. À ce moment-là, il y a de grandes chances pour que l’une d’entre elles se fasse tuer. Les chasseurs ne peuvent pas voir leurs petits, imaginent un individu adulte seul, et tirent. C’est à cause de ces comportements que des bébés meurent isolés, incapables de se nourrir et de grandir par eux-mêmes » ajoute la responsable de Humane Society International.
PhocaLux possède un permis qui autorise à tuer les phoques du Groenland, mais pas les phoques à capuchon. Cependant, les deux espèces partagent le même habitat. Les spécialistes sont unanimes : s’ils ne sont pas directement pris pour cible, de très nombreux phoques à capuchon sont tués chaque année. Et pour tous ceux qui ne le seraient pas, il est clair que l’activité humaine intense et particulièrement violente nuit grandement à la pérennité de l’espèce. « Le bruit des moteurs de bateaux, des coups de feu, des cris de phoques agonisants et évidemment dérangeant pour toutes les espèces qui tentent de survivre sur le territoire. C’est un énorme problème auquel nous sommes confrontés aujourd’hui » persiste Rebbeca.
Comme vous devez vous en douter, PhocaLux n’a pas souhaité répondre à nos confrères de The Dodo. Et au vu de la situation, on se demande bien, de toute façon, comment l’entreprise pourrait justifier de tels agissements. Évidemment, la politique de l’autruche est bien plus simple à adopter.
Et Rebbeca Aldworth d’ajouter : « Ce qu’ils font est répréhensible, idem pour le gouvernement. Indirectement (grâce au système de zones pseudo-protégées, ndlr), il autorise des multinationales à massacrer des animaux sauvages lors de la période où ils donnent naissance. Les autorités canadiennes n’ont absolument aucune excuse. »
Justement, le gouvernement, parlons-en. Logiquement, ce dernier met en avant une toute autre version, bien loin de celle défendue par les biologistes et les protecteurs de la nature. Il évoque notamment, via son ministère Pêches et Océans, la régulation de la chasse grâce à des contrôles effectués sur le terrain. C’est en tout cas ce qu’a dit Vance Chow, conseiller en communication rattaché au cabinet du ministère à nos confrères de The Dodo : « La chasse est une activité économique et culturelle importante pour les communautés canadiennes, québécoises et arctiques. À ce titre, le gouvernement canadien s’engage à en surveiller les méthodes afin d’en garder le côté durable. Nous ne tolérerons aucune pratique inhumaine dans le domaine de la chasse aux phoques. C’est pourquoi nous avons mis en place des inspections en mer et dans les ports, mais également des patrouilles aériennes. »
Alors oui, on pourrait être tentés de croire ces beaux mots et ces phrases pleines de bon sens. Malheureusement, la réalité est, une fois encore, bien plus triste que ce que les politiques laissent (trop souvent) entendre. Si, pour PhocaLux, la saison de chasse a commencé le 28 mars, depuis le 10 avril, elle a aussi démarré pour les entreprises concurrentes.
Résultat, ce sont encore plus de bateau qui prennent la mer pour traquer des bébés phoques sans défense, pas suffisamment développés pour nager correctement et bien trop faible encore pour subvenir seuls à leurs besoins nutritifs. Une aubaine pour les chasseurs, qui en réponse, n’hésitent pas à tirer à bout pourtant avec des armes de gros calibres, à les frapper avec des battes de baseball ou des pioches. Autant d’outils pour tuer en masse, qui en plus n’épargnent pas la souffrance. Il n’est donc pas rare de voir certains individus agoniser, se vider de leur sang pendant de longues, très longues minutes.
Et comme si la situation n’était pas assez difficile à gérer, un autre facteur alimenté par l’Homme vient encore jouer en défaveur des phoques : le réchauffement climatique. « La glace fond de plus en plus tôt dans l’année, et cela empêche les phoques de se cacher facilement. De leurs embarcations, les chasseurs peuvent les repérer et les shooter de loin, environ 40 à 50 mètres. Dans ces moments, le bateau bouge, les phoques bougent, et l’eau bouge aussi. Ainsi les chasseurs n’arrivent pas toujours à récupérer les individus qu’ils viennent d’abattre. On retrouve très souvent des cadavres de phoques sur la banquise ou dans l’eau. »
En ce qui concerne les bateaux, là encore, il y a beaucoup à dire. En général, chaque navire peut stocker jusqu’à 400 phoques par jour, et un chasseur est autorisé par la loi à en tuer maximum 250 par jour. Tout au long de la saison, ces chiffres sont multipliés à grande échelle, et cela mène à la disparition de centaines de milliers d’animaux. Là encore, les experts pensent que ces pratiques vont faire dangereusement chuter la population de phoques au Canada, mais il n’y a pas encore de statistiques pouvant prouver cette immense perte pour la planète.
« Pour ne pas prendre de risque et éviter le scandale, le gouvernement canadien a une manière bien à lui de recenser le nombre de phoques. Ils vont sur place, comptent tous les phoques qu’ils voient, estiment combien il y en a dans les zones où ils n’ont pas pu aller, puis estiment ce qui ne sont pas encore nés, puis estiment combien sont cachés dans l’eau en utilisant des variables plus arbitraires les unes que les autres. Puis, enfin, ils arrivent à un chiffre officiel qui établit le nombre total de phoques » raconte Rebecca Aldworth. Et elle ajoute : « Selon nous, la population de phoques est augmentée et faussée de manière grossière. Et il ne faut pas oublier que c’est sur cette statistique que les autorités se basent pour définir le quota d’individus qui pourra être tué. »
En d’autres termes, les autorités canadiennes font la pluie et le beau temps concernant la chasse aux phoques, mais aussi pour ce qui est du marché de la fourrure. Chaque année, des centaines de milliers d’animaux sont massacrés au nom du lobbying et de la pression économique insupportable qui va avec.
N’est-il pas grand temps d’agir et de dénoncer ces actes inhumains ? Petit à petit, la population canadienne a fait part de son indignation auprès de ses élus locaux et nationaux, mais elle n’y arrivera pas seule. Tous autant que nous sommes, il est de notre devoir d’exposer ce problème grandissant à la face du monde.
Envie d’en savoir plus sur ce que vous pouvez faire afin de stopper le massacre des phoques au Canada ? Rendez-vous sur le site Internet de Humane Society International !